Textes
Des grands classiques, des moins connus, des inédits...
Témoignage par mail du premier chilien ayant effectué un tour du monde, décédé en 2011 d'un accident d'avion... Bonjour à tous,
Nous sommes maintenant à moins de 24h de la fin de la régate du tour du monde, et quand vous allumerez vos ordinateurs, il est possible que nous ayons une avance proche de 150 miles. Beaucoup d’entre vous penseront que nous avons gagné cette étape, du début à la fin. Nous aimerions beaucoup qu’il en soit ainsi, mais l’expérience nous enseigne qu’il faut attendre, et que c’est à l’arrivée que les régates se gagnent, ou se perdent. […] Comme à partir de maintenant, nous aurons peu de temps pour écrire, je voudrais partager avec vous tous, fidèles suiveurs de la Colorina, mes sentiments et mon vécu tout au long de ce voyage. […] A [nos sponsors], et aux dizaines d’amies et amis qui nous ont aidés à concrétiser ce rêve, d’infinis remerciements et de façon très particulière à « el Negro » qui est un grand marin, un grand navigateur et un grand compagnon. Depuis que j’ai commencé à écrire, une fois la régate commencée, je me suis donné un seul objectif, celui de vous raconter sans filtre ce qui nous arrivait et ce qui traversait nos esprits et nos cœurs. Je reconnais que je n’ai pas respecté complètement ce principe, surtout en mer du Sud, quand nous étions très près de nous retourner, […] mais c’était pour une noble raison : nous ne voulions pas inquiéter nos familles plus que le nécessaire. Mais de façon générale, le récit qui a commencé par un mail envoyé à une vingtaine d’amis et qui en est déjà à des milliers de copies, est une histoire assez proche de celle que nous avons vécue pendant ces 9 mois de régate autour du monde. J’espère que ce récit aura servi à quelqu’un, et dans ce cas-là, tout ceci aura eu du sens, naviguer aura été un peu plus que juste laisser des étoiles dans la mer. Nous avons subi l’échec, l’agonie et la peur, nous avons savouré le succès et les émotions les plus profondes ; la force de la nature nous a captivés et nous nous sommes surpris nous-mêmes concernant nos propres capacités et surtout notre résistance physique et émotionnelle ; nous avons admiré la noblesse de nos rivaux et comme dans toute entreprise humaine, nous avons vécu des réussites et commis des erreurs. Voici un court résumé de ce que j’ai appris, ou redécouvert, pendant tout ce temps […] :
Quand tu as des doutes sur ce que tu dois faire, demande-toi quel est ton Cap Horn ; équipe-toi d’un petit sac à dos avec juste le nécessaire pour survivre, et commence à marcher. N’arrête jamais de regarder le ciel. Alors tu découvriras l’albatros, qui t’apprendra à décoller avec effort et à voler en liberté. Et tu te rendras compte que tu n’as pas besoin de voler en bande. Ne renonce jamais, jamais à tes rêves ; poursuis-les passionnément, et si tu ne les atteins pas, peu importe. Rien que le fait de parcourir ce chemin aura valu la peine de vivre ; et pourvu que le rêve que tu poursuis soit le rêve impossible. Si tu as la chance, un jour d’affronter des rivaux de la taille de ceux que nous avons affrontés pendant cette régate, honore-les, admire-les, mais donne tout ce que tu as pour les vaincre en bonne lutte ; car ils le méritent. Si, le jour de ma mort, on me donne la possibilité de renaître, je choisis d’être un albatros et de voler dans la Mer du Sud, et de regarder les intrépides navigateurs qui risquent leur vie et quittent tout à la recherche de leur rêve, à la recherche de leur rêve impossible. Et ne prends jamais trop au sérieux un navigateur qui termine un tour du monde, il sait juste naviguer un peu plus ; rien de plus !
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Et à ne pas oublier :Hélie Denoix de Saint Marc, « Que dire à un jeune de 20 ans », récité par Jean Piat
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Août 2022
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